Angola : Anne Zingha, reine du Ndongo et du Matamba

Au XVIIe siècle, Anne Zingha règne sur les royaumes de l’actuel Angola et parvient à éviter la colonisation de son pays. Une icône angolaise et panafricaine de la résistance à l’impérialisme européen.

Njinga Mbandi, Nzinga Mbandi, Ana Nzinga, Anne Zingha… De nombreux noms sont attribués à la la reine reine du Ndongo et du Matamba qui régna au XVIIe siècle sur un territoire aussi vaste que l’actuel Angola. Une reine qui reste à ce jour un exemple de gouvernance féminine en Afrique.

À la mort de son père, le roi du Ndongo Ngola Mbandi Kiluanji en 1617, le frère d’Anne Zingha, Ngola Mbandi, le remplace à la tête du royaume. Peu charismatique, à l’inverse de son père, il est également moins intelligent que sa sœur. Ce dont il a conscience : en 1622, Ngola Mbandi envoie Anne Zingha à Luanda en émissaire, afin de négocier un traité de paix avec le gouverneur du Portugal. Lors de cet entretien, Anne Zingha s’impose comme une redoutable négociatrice et diplomate.

Deux ans plus tard, son frère décède. C’est le moment qu’attendait Anne Zingha : elle prend le pouvoir, et devient reine. Ses tactiques guerrières et d’espionnage, ses qualités de diplomate, ses jeux d’alliances stratégiques ainsi que sa connaissance des enjeux commerciaux et religieux lui permettent de faire résister les royaumes du Ndongo et du Matamba aux velléités coloniales des Portugais et des Néerlandais, jusqu’à sa mort en 1663.

Un modèle féminin

Anne Zingha était une femme instruite et cultivée. En plus de sa langue maternelle, elle parlait portugais, atout de taille pour traiter avec ses adversaires. Elle connaissait également l’histoire et les populations portugaises, ce qui lui permettait de s’adapter aux situations de négociation avec une connaissance parfaite des enjeux.

Redoutable stratège et diplomate, l’ensemble de son règne a consisté à préserver l’intégrité territoriale de son royaume, par la négociation avec les Portugais. Anna Zingha envoyait régulièrement des espions à Luanda étudier l’entraînement des troupes portugaises, afin de préparer son armée aux combats. Les enjeux religieux et commerciaux n’avaient aucun secret pour elle, et elle s’en servait pour négocier avec les Portugais. La promesse de conversion des peuples du Ndongo et du Matamba au christianisme était sa principale monnaie d’échange : elle s’est elle-même fait baptiser en 1623, lors d’une visite à Luanda.

Son souvenir a inspiré de grandes figures de la résistance du parti Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA), comme Deolinda Rodrigues, Iena Engracia ou encore Vastok Inga. Son exemple a également marqué la société angolaise, où les femmes sont relativement bien représentées dans l’armée, la police, au gouvernement, et dans les secteurs publics et privés angolais.

Une figure centrale de l’histoire de l’Afrique

Aujourd’hui, elle reste un repère culturel, et une figure historique essentielle afin de comprendre la construction de l’identité angolaise. Durant la guerre de libération de l’Angola (1961 – 1974), sa mémoire a souvent été rappelée par les leaders de l’indépendance, qui l’ont érigé en icône. En 1975, à l’indépendance du pays, une statue a été érigée en son honneur à Luanda, comme symbole de la résistance et de la liberté.

Mais l’esprit de résistance et de liberté de Zingha dépassera bientôt les frontières angolaises, devenant un symbole de la lutte contre la colonisation européenne. Et Anne Zingha incarne, aujourd’hui encore, une figure centrale de l’histoire de l’Afrique.

Solène Leroux , Jeune Afrique

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